Paysages célestes, une oeuvre expliquée par l’herméneutique de l’art

Par HeleneCaroline Fournier, experte en art et théoricienne de l’art, rédactrice spécialisée, critique, journaliste spécialisée indépendante, évaluatrice en collections

UNE OEUVRE DE MAHESVARI

Paysages célestes est une encre de Chine sur papier aquarelle, travaillée en lavis monochrome. Cette oeuvre se regarde dans les deux sens. Dans le sens vertical, on y voit une chute d’eau et des arbres qui poussent sur les parois rocheuses qui bordent une cascade. Dans le sens horizontal, on y voit une silhouette de femme qui glisse ou qui se baigne dans un torrent au bord duquel des arbres s’érigent vers le ciel. Du fait de sa lecture dans les deux sens, l’oeuvre a plusieurs interprétations. L’eau est un élément important, elle est à la fois source de vie, moyen de purification et centre de régénérescence. Les eaux représentent l’infinité des possibilités, elles contiennent tout le virtuel, l’informel, le support de la vie ainsi que toutes les promesses de développement. S’immerger dans les eaux pour en ressortir sans s’y dissoudre totalement, sauf par une mort symbolique, c’est retourner aux sources, se ressourcer dans un immense réservoir de potentiel et y puiser une force nouvelle. L’eau, opposée au feu, est yin. La montagne a une symbolique multiple. Elle est haute, verticale, élevée, rapprochée du ciel. Elle participe à la transcendance. Elle va à la rencontre du ciel et de la terre. Dans plusieurs traditions, la montagne est la demeure des dieux et le terme de l’ascension humaine. Les étapes de la vie mystique sont souvent décrites comme une longue ascension. La montagne exprime aussi les notions de stabilité, d’immuabilité, parfois même de pureté. De façon générale, cette paroi rocheuse qui monte vers le ciel peut être associée au centre et à l’axe du monde d’où la source de vie (l’eau) est issue. Dans la peinture chinoise classique, la montagne s’oppose à l’eau comme le yang au yin. L’immuabilité à l’impermanence, la première est le plus souvent figurée par le rocher et la seconde par la cascade. Les arbres sont symboles de vie. Ils sont sacrés. L’arbre est la figure symbolique de l’entité qui dépasse l’humain. Il est en perpétuelle évolution, en ascension vers le ciel, il évoque tout le symbolisme de la verticalité. Il sert aussi à symboliser le caractère cyclique de l’évolution cosmique. L’arbre met aussi en relation les trois niveaux du monde: le souterrain, la surface et les hauteurs qui sont attirées par la lumière du ciel. C’est la colonne vertébrale, en quelque sorte, qui soutient le corps humain, temple de l’âme. Il s’élève au-dessus du champ de réflexion terrestre. Dans la version où l’on voit la silhouette féminine, on peut y voir la rencontre d’une aspiration humaine, la transcendance et l’instinct naturel. Le féminin personnifie un aspect de l’inconscient nommé anima (la personnification de toutes les tendances psychologiques féminines de la psyché de l’homme) qui, dans des traditions anciennes, était utilisée pour sonder la volonté des dieux et communiquer avec eux. Cette anima glisse ou se baigne dans les eaux qui descendent des montagnes. Dans la version verticale où l’anima est moins visible, elle se transforme en brouillard ou en brume, évoquant une période transitoire entre deux états. Ce brouillard précède les révélations importantes, c’est le prélude à une manifestation. Compte tenu des éléments symboliques qui donnent le contexte, il s’agit là d’un préambule à quelque chose qui sera d’ordre spirituel pour l’artiste.

SUR INTERNET
www.artzoom.org/mahesvari

SUR HEART
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