« On ne laisse pas sa trace en marchant dans celle des autres. » – anonyme
En tant qu’artiste interdisciplinaire, Hermine se trouve à l’étroit dans son actuel atelier de 285 pieds carré (environ 87m2). « À mes yeux, mon atelier est petit. J’ai besoin de trois ou quatre ateliers en un. Les trois principales disciplines auxquelles j’adhère ont des besoins particuliers. La poussière du sablage en sculpture se dépose partout; impossible de faire un vernis dans le même espace. Il faut prévoir et être patiente. Je n’ai pas d’eau ni de lavabo… L’accès n’y est pas facile ni accueillant. Je dois passer au travers de notre entreposage domestique au deuxième étage de notre garage. » L’artiste gère son espace de travail, pratiquement au quotidien, en mettant de l’avant de petits projets. « Je souhaite avoir un espace adjacent pour y laisser s’envoler les particules de poussière qu’on retrouve pour la coupe des métaux, bois, toupie, sablage ainsi que pour le polissage de la pierre qui nécessite aussi de l’eau. » Elle cherche des solutions à court terme, mais une situation permanente devra impérativement être trouvée d’ici quelques années. « Aussitôt que je verrai l’opportunité de me réorganiser, je le ferai. » En 2022, après plus de 3 ans d’occupation, l’artiste a pris la décision de quitté son local en location au Centre de Production en Art Actuel Les Ateliers situé à la Maison-Mère de sa municipalité. La réalité de l’augmentation des coûts de location a été l’élément déclencheur. Il était le double de superficie avec toutes les commodités. On peut dire, dans son cas particulier, que son environnement de travail influence grandement son travail artistique. « Je privilégie la facilité, la rapidité et les petits formats. Je dois occuper l’espace de notre garage pour entreprendre les grands formats ou le sous-sol de la maison. Dans un cas comme dans l’autre ce n’est pas l’idéal et cela doit être temporaire. J’essaie de faire les projets poussiéreux à l’extérieur en période estivale. »
L’artiste travaille avec plusieurs types de lumière. En sculpture, elle préfère de loin la lumière naturelle. « Celle qui accentue les creux et les bosses, elle est parfaite dans les courbes de mes sculptures et la compréhension de la troisième dimension selon le changement de la lumière tout au long de la journée. Une lumière artificielle est tout de même nécessaire pour parfaire le sablage de la surface. » Quant à la photographie, c’est plus compliqué : « L’impression de la photographie demande un éclairage fiable et plus constant. Je calibre la lumière et la couleur que je vois à l’écran de l’ordinateur avec celle qui sortira une fois imprimée. Mon calibreur s’ajuste en fonction de la luminosité de la pièce. Je préfère sortir mes impressions moi-même pour éviter les insatisfactions et surprises. » Quant à la peinture et le dessin, Hermine privilégie la lumière artificielle qui convient parfaitement à ses besoins. Cependant, elle constate un changement de tonalité, de luminosité sur la couleur qu’elle utilise avec la lumière changeante en dehors de l’atelier. « Parfois c’est pour le mieux et le tableau regorge d’effet lumineux, malheureusement l’inverse est aussi véridique. Il m’est arrivé de ne plus percevoir toutes les nuances que j’avais faites dans les ombres de quelques tableaux fixés au mur d’une exposition. C’est décevant de se rendre compte de cette absence de subtilité une fois l’oeuvre exposée, pourtant conçues sous un éclairage qui les valorisait en atelier. » La lumière trop crue (ou carrément absente) d’un lieu d’exposition moins bien équipé a une incidence sur la mise en valeur de son travail car Hermine travaille dans la subtilité, autant dans les textures que dans les couleurs.
Le manque d’espace en atelier a aussi une incidence directe sur le choix de ses formats. L’artiste réduit ses dimensions et se sent limitée dans ses mouvements. « J’aime bouger autour de mon travail quand je crée. Demeurer assise me cause des douleurs et de l’inconfort. » Elle avoue avoir déjà eu des spasmes respiratoires parce qu’elle retenait son souffle en faisant des miniatures à la loupe… L’artiste a changé sa façon de travailler par manque d’espace. « Je recycle mes toiles en les fractionnant ; je les déchire et je reconstruis à partir des morceaux… À présent, je réinvente mes tableaux et mes photos. Je favorise ce qui est à ma portée. Cela ne m’empêche pas de rêver de faire agrandir mon travail, une petite sculpture pourrait devenir monumentale ! »
Son atelier est intime, secret et discret. Hermine aime s’y retrouver sans que personne ne s’en aperçoive. « C’est mon refuge, là où je retourne à la rencontre de mon histoire ou de celle qui m’entoure. Je choisis la musique selon ma vibration du moment. Mon intuition doit être en harmonie avec les sons qui occupent la pièce. Je n’aime pas être dérangée par la venue des repas, la visite imprévue, le téléphone… J’aime ressentir, cibler, capter l’essentiel, pour me déposer et avancer vers mon intention de créer. » En comptant les heures qui touchent de près ou de loin à sa production, l’artiste travaille environ 20-30 heures par semaine. L’automne est une période plus propice à la production. « Je me sens affectée par le ralentissement de la nature, ça m’apaise. » Les saisons sont utilisées selon leurs avantages et leurs inconvénients. « J’adore l’atmosphère de la pluie automnale qui tombe sans fin ainsi que le confort intérieur des journées glaciales. Elles me permettent de me déposer dans mes projets. De décembre à mars, la période y est tout aussi bonne, cependant l’atelier est moins accessible. Quand l’été s’agite, c’est le temps de m’extérioriser, travailler à l’extérieur et prendre des séries de photographies inspirantes qui serviront dans ma production plus tard dans l’année. » Hermine aime partir tôt le matin, en catimini, avant que les responsabilités quotidiennes ne la sollicitent. « Souvent je me lève la nuit, pour plonger sans interruption dans un projet qui me fascine. Pour avoir du temps en continu ! »
Pour ce qui est de travailler devant public, Hermine le fait par nécessité, quand cela l’exige, mais l’inconfort n’aide pas à la productivité. « En public, je vis un stress qui est devenu avec le temps plus difficile à supporter. Je m’installe à l’écart un peu en retrait.» Il faut comprendre que, pour l’artiste, l’acte de création est solitaire et intérieur. Par le passé, elle a déjà ouvert son atelier au public quand elle avait son atelier au Centre de Production en Art Actuel Les Ateliers, situé à la Maison-Mère de Baie-Saint-Paul. « Les portes ouvertes en atelier me mettent sous tension. C’est une partie de moi que j’ai essayé de maîtriser avec le temps, sans trop de succès. Je fais un peu n’importe quoi en présence d’un regard ! La relation avec la clientèle demeure un défi de chaque instant. » L’artiste n’ouvre plus son atelier officiellement au public, mais a plutôt choisi d’accueillir certaines personnes à l’occasion. Il y a toujours des œuvres dans son atelier en prévision de ces rencontres plus intimistes.
Celle qui a débuté en tant que professionnelle en 2001 expose notamment lors d’expositions régionales, provinciales et internationales. On retrouve aussi son travail dans plusieurs galeries d’art.
« En ce moment, je souhaite seulement refaire autrement mes créations, les actualiser. Je ferai face à mes angoisses plus tard… »
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